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La Relation enseignant-étudiant

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Afin de dissiper certaines confusions et tensions que j’ai observées au sein de la communauté Palden Shangpa et, plus généralement, parmi les étudiants du Dharma, moi, Kalou Rinpoché, je souhaite redéfinir dans son ensemble la notion de relation enseignant-étudiant dans notre Lignée Palden Shangpa.

Les concepts de « maître » et « disciple » peuvent conduire à une certaine rigidité ainsi qu’à une notion d’exclusivité, ce qui fait souvent faire fausse route aux étudiants et aux enseignants. Les étudiants auront tendance à abdiquer la responsabilité personnelle de leur chemin spirituel et à développer un attachement personnel à « mon maître, mon lama » ; là-dessus, les enseignants pourront se laisser séduire par l’illusion de posséder une autorité spirituelle associée à l’idée « mon disciple, mon étudiant ». Ces deux dérives causent un attachement malsain et une dépendance réciproque qui deviennent un obstacle à l’indépendance spirituelle, à la responsabilisation personnelle, et à l’éveil naturel – objectif même de notre chemin bouddhiste.

Le plus souvent, une fois que s’est développée cette dépendance mutuelle, il devient impossible à d’autres enseignants de la communauté, ou à qui que ce soit, de donner les instructions nécessaires à l’étudiant : l’attitude exclusive qui règne dans son esprit bloque sa capacité à entendre ces conseils. Bien sûr, les étudiants peuvent respecter d’autres enseignants en fonction de leurs liens personnels ; cependant, il n’incombe ni à l’étudiant ni à l’enseignant de déterminer par eux-mêmes l’étendue de l’autorité à l’œuvre dans leur relation au sein de la Lignée. En effet, déterminer et désigner cette autorité relève de la responsabilité du détenteur, officiellement reconnu, de la Lignée Shangpa. Cette désignation ne reflète pas un degré de respect – que l’on doit, de manière égale, à toute personne ayant accompli la retraite de trois ans, une longue retraite, ou de longues études –, mais permet plutôt de faire clairement la différence entre le respect et la fonction.

Le respect naît spontanément à l’égard de celui ou celle qui nous mène avec bonté vers la compréhension, que ce soit dans le contexte d’études ou dans un contexte religieux, thérapeutique, social… Les attentes excessives, la déférence exagérée envers un « maître-racine » du bouddhisme tibétain, prennent parfois une telle « solidité » que, même si le maître-racine fait une erreur, les étudiants sont enclins à l’accepter aveuglément en perdant tout discernement… Ceci alors même que le discernement est justement l’une des qualités essentielles à cultiver sur la voie bouddhiste.

Je crois qu’il est vital que les étudiants, en tant que personnes en train de s’éveiller, apprennent à voir leurs enseignants – aussi remarquables soient-ils – pas seulement comme des enseignants, mais également comme des êtres humains, en évitant de les idéaliser au-delà du champ de l’expérience humaine normale. Cela représente une protection importante pour tous, étudiants et enseignants.

La fonction reflète à la fois les tâches correspondant aux différents besoins dans le processus de maturation de l’étudiant et les qualités requises de l’enseignant en vue de l’accomplissement de ces tâches spécifiques. Si aucune fonction particulière n’est définie, alors on aura tendance à considérer les lamas ou enseignants comme qualifiés de la même façon pour toutes les tâches. Cela mènera soit à une trop grande attente de la part des étudiants, soit à un dérapage vers le shopping spirituel qui est ce qui se produit lorsque les étudiants se mettent à n’écouter que les lamas ou les instructions qui leur plaisent, au lieu de suivre la direction spirituelle personnelle offerte comme partie intégrante de leur processus d’apprentissage.

En établissant ces nouveaux rapports étudiant-enseignant pour notre Lignée Shangpa, je souhaite fermement placer le développement et le bien-être de l’étudiant au centre de notre activité éducative dharmique. Les quatre rôles éducatifs spécifiques décrits ci-dessous seront occupés par les enseignants Shangpa afin d’aider les étudiants dans le processus de leur éveil. On ne doit pas considérer ces rôles comme linéaires ou hiérarchiques, mais plutôt comme cycliques, éléments d’une spirale ascendante qui continuera à éveiller, approfondir, enrichir et intégrer la compréhension, les réalisations et les valeurs du Dharma dans notre vie quotidienne.

 

INSTRUCTEUR / PROFESSEUR DU DHARMA

INITIER CORRECTEMENT les étudiants à la compréhension de base, générale, des principes et des pratiques du Dharma : c’est la tâche de l’INSTRUCTEUR / PROFESSEUR DU DHARMA.

Les professeurs du Dharma présentent le bouddhisme classique et le bouddhisme Vajrayana, permettant ainsi la transmission des concepts de base relatifs au bouddhisme et à la méditation, et ce, au coeur même de la réalité de la vie des personnes dans leurs divers environnements. Ils ne sont pas autorisés à enseigner des visualisations ou des techniques du Vajrayana, à conférer la transmission de vœux (de refuge, des préceptes, ou de bodhisattva), ni à donner des initiations.

Les instructeurs du Dharma s’investissent naturellement dans des questions-réponses avec les étudiants, en public ou en privé. Ils utilisent leur poste (fonction) pour sans cesse rafraîchir l’esprit de l’étudiant et le remettre dans la réalité du Dharma au sein de sa propre vie. Ce faisant, ils soutiennent son ouverture et sa compréhension tout au long des différentes phases de son cheminement.

 

INSTRUCTEUR DE MÉDITATION

TRANSMETTRE AVEC GRAND SOIN aux étudiants les outils de base de la méditation, tout en veillant à leur intégration dans la vie quotidienne de l’étudiant : c’est la tâche de l’INSTRUCTEUR DE MÉDITATION.

Les instructeurs de méditation introduisent les étudiants à des pratiques telles que la stabilité méditative (shiné), l’introspection méditative (lhaktong) et l’entraînement à la compassion d’un coeur ouvert (lodjong) ; ils ne sont pas autorisés à enseigner des visualisations ou des techniques du Vajrayana, à conférer la transmission de voeux (de refuge, des préceptes, ou de bodhisattva), ni à donner des initiations. De manière générale, ces instructeurs doivent avoir accompli la retraite de trois ans et, bien entendu, ils doivent avoir été accrédités comme tels par le détenteur de la Lignée.

Le rôle de l’instructeur de méditation est de donner des techniques de méditation précises, relatives à la stabilité mentale et à la gestion des émotions (affects), tout en s’assurant que chaque étudiant est capable de les relier à son vécu. Le recours au format questions-réponses est ici utilisé pour amener l’étudiant à une pleine compréhension des mécanismes méditatifs et à une dissipation complète des doutes relatifs à la pratique spécifique. Ce faisant, l’instructeur de méditation aide les étudiants à construire les outils « mentaux » de base, nécessaires à une vie quotidienne tant fructueuse qu’harmonieuse ; de cette façon, il les aide à approfondir leur compréhension et leur pratique du Dharma. En procédant régulièrement à des vérifications suivies de réajustements, ces instructeurs attentifs continuent à affûter l’esprit de l’étudiant, à le rafraîchir et à bien le repositionner en vue de l’application de ces outils et de l’atteinte des objectifs.

 

CONSEILLER SPIRITUEL

GUIDER OU CONSEILLER AVEC SAGESSE les étudiants vraiment engagés, dans leur motivation et leurs pratiques sur le chemin spirituel ; améliorer, si nécessaire, le travail accompli grâce aux deux précédents types d’instructeurs ; et mener les étudiants vers un épanouissement harmonieux de la sagesse dans leur vie : tout cela constitue la tâche du CONSEILLER SPIRITUEL.

Le conseiller spirituel est autorisé à donner les voeux de refuge, les voeux ou préceptes de fidèle laïc, les voeux de bodhisattva, des instructions de visualisation ou de méditation, de même que des initiations d’un certain niveau (en fonction de son degré d’accréditation par le détenteur de la Lignée). Ce faisant, le conseiller spirituel garantit l’équilibre émotionnel et spirituel des étudiants, les accompagne tout au long de leur processus d’éveil et les conduit à une compréhension plus fine de la nature de leur esprit.

 

JOYAU DE LA LIGNÉE

OFFRIR L’ORIENTATION ULTIME vers l’éveil : c’est la tâche du JOYAU DE LA LIGNÉE.

Un Joyau de la Lignée est responsable de la transmission d’initiations et d’autorisations de pratiques qui relèvent de niveaux plus profonds, et ce, conformément à son accréditation ; de surcroît, il est responsable de l’accréditation des enseignants Shangpas des statuts précédents ; enfin, il est responsable de l’acceptation des postulants à la retraite de trois ans.

Un Joyau de la Lignée a également la responsabilité de s’assurer de l’efficacité du processus éducatif dans son ensemble et de l’ajustement précis des relations étudiants-enseignants, afin d’affranchir leur esprit des derniers obstacles à une pleine compréhension ainsi qu’à une entière indépendance spirituelle.

Tout comme j’ai moi-même reçu des lettres officielles de nomination en tant que détenteur officiel de la Lignée Shangpa, quiconque se trouvera dans l’un des statuts d’enseignant de cette Lignée devra obligatoirement avoir reçu une confirmation écrite officielle de sa nomination à ce poste, de la part du chef (en exercice) de la Lignée ou de l’un de ses Joyaux.

 

Outre les rôles spécifiques décrits par la présente configuration éducative, il existe beaucoup d’autres rôles importants qui rehaussent et enrichissent la vie spirituelle et culturelle de notre communauté du Dharma, qu’ils soient de nature artistique, linguistique, culturelle, sociale ou administrative. Il est très important de développer de la gratitude et du respect pour tous ceux qui participent au fonctionnement de notre Lignée et de notre communauté, et qui les soutiennent de ces différentes manières.

En cette période où le Dharma est encore dans une phase de transition entre cultures orientales et occidentales, il est capital de cultiver une appréciation positive et un respect mutuel entre Asiatiques et Occidentaux, enseignants ou étudiants. Venus de l’Himalaya, les enseignants asiatiques doivent faire de leur mieux pour enseigner dans la langue du pays où ils résident et apprendre les concepts ainsi que la façon d’instruire des Occidentaux. Les enseignants occidentaux, quant à eux, doivent faire de leur mieux pour assimiler ce qu’offre l’approche des enseignants asiatiques, une approche du cœur, simple et profonde. Tous doivent s’assurer que les étudiants, qu’ils soient originaires de l’Orient ou de l’Occident, comprennent et apprécient la validité, la complémentarité des deux approches, et ce, d’une manière qui favorise l’harmonie du Dharma dans leur cœur et au sein de la communauté.

J’ai grand espoir que l’établissement de cette configuration enseignant-étudiant permettra aux étudiants d’évoluer plus librement et plus efficacement au travers de leur parcours éducatif du Dharma, et de devenir de plus en plus indépendants, autonomes dans leur cheminement à la découverte d’eux-mêmes. Mon souhait est que la présente approche, grâce à cette configuration, crée l’ouverture – à l’image d’Internet, qui a transformé les modes de communication et abattu de vieilles barrières au profit de l’épanouissement personnel – en rendant notre Lignée et nos étudiants fin prêts pour cet âge d’indépendance et d’interconnexion, notre XXIe siècle.


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